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Les insoumises du Tango : L’histoire cachée des pionnières

Portrait de Paquita Bernardo

Avant d’être des partenaires égales, les femmes du tango ont dû se battre pour exister. Découvrez les parcours de Paquita Bernardo, la première femme bandonéoniste, et d’autres figures audacieuses qui ont donné sa voix et son âme à la musique de Buenos Aires.

Les insoumises du Tango : Comment les femmes ont donné son âme à la musique de Buenos Aires

Introduction : Une pensée triste qui se danse… et se réinvente

Pour comprendre l’histoire du tango, il faut imaginer le Buenos Aires de la fin du XIXe siècle: un port bouillonnant, un creuset où se mêlaient les espoirs et les nostalgies de vagues d’immigrants venus d’Europe. C’est dans ce monde en pleine mutation, dans les cours des conventillos (maisons collectives), les bars des faubourgs et les maisons closes, qu’est né le tango. À ses origines, c’était un univers résolument masculin. En raison de la pénurie de femmes dans ces milieux populaires, les hommes apprenaient à danser entre eux, dans la rue, s’entraînant aux pas et au guidage avant de s’aventurer dans les milongas, les bals où ils pouvaient enfin trouver une partenaire.  

Dans ce contexte initial, la femme n’était pas une partenaire de création, mais un objet de désir, une muse lointaine ou une danseuse tarifée, une “humble employée” payée à la danse. Les paroles des premiers tangos la dépeignaient souvent comme une figure tragique, une source de trahison et de chagrin, la cause de cette “pensée triste qui se danse”. Son rôle était passif, sa voix, silencieuse. Elle était celle pour qui l’on dansait, celle pour qui l’on chantait, mais rarement celle qui dansait pour elle-même ou chantait sa propre histoire.  

Cette présentation se propose de déplacer le projecteur. Nous allons laisser dans l’ombre, pour un instant, les grands noms masculins que tout le monde connaît, pour mettre en lumière les parcours de femmes audacieuses et visionnaires qui ont refusé ce rôle subalterne. Elles ont bravé les conventions sociales, se sont emparées des instruments, des mots et de la scène pour devenir des artistes à part entière, des créatrices et des leaders. Leur histoire n’est pas seulement une page méconnue de l’histoire du tango ; elle est une puissante illustration de la quête de sa propre voix, de la construction d’une communauté et de la capacité de l’art à transformer la société. C’est un récit de résilience, de créativité et de connexion qui résonne profondément avec la mission de notre association, Diamono, et l’esprit de ce Café-Tango. Car, à travers nos programmes comme “Tango pour Tous”, nous croyons fermement que la danse et la musique sont des langages universels pour briser l’isolement, renforcer les liens et permettre à chacun, quelle que soit son histoire, de trouver sa place et d’explorer sa propre joie. L’histoire de ces pionnières est la preuve vivante que le tango, bien plus qu’une danse, est un chemin vers l’autre et vers soi.  

 

Paquita Bernardo

 

La révolution du fuelle – Paquita Bernardo, la pionnière au Bandonéon

Au cœur du son du tango se trouve un instrument à l’âme complexe et nostalgique : le bandonéon. Plus qu’un simple instrument, il était, au début du XXe siècle, un bastion de la masculinité. La posture même requise pour en jouer, qui oblige à ouvrir et fermer les jambes pour actionner le soufflet, était jugée socialement “inappropriée” pour une femme respectable. C’était un tabou puissant, une frontière invisible mais bien réelle qui réservait l’âme du tango aux hommes. C’est cette frontière que Francisca Bernardo, surnommée “Paquita“, a décidé de dynamiter.  

Née en 1900 dans le quartier populaire de Villa Crespo, fille d’immigrants espagnols, Paquita (1900-1925) était destinée à une vie conventionnelle. Inscrite par ses parents à des cours de piano, instrument jugé plus convenable pour une jeune fille de son rang, elle découvre un jour au conservatoire le son envoûtant du bandonéon joué par un camarade. Ce fut une révélation. Hypnotisée, elle décide que ce sera son instrument. Consciente de l’interdit, elle commence à étudier en secret, cachée, apprenant les bases par elle-même. Lorsqu’elle révèle enfin son ambition à sa famille, la réaction est celle attendue : un refus catégorique. Mais Paquita, dotée d’une détermination hors du commun et soutenue par ses frères, finit par imposer sa volonté. Sa lutte n’était pas seulement pour un instrument, mais pour le droit de choisir sa propre voie.  

Son talent était si évident que sa carrière fut fulgurante. Paquita n’était pas une simple curiosité ; elle était une virtuose. Son ascension a brisé les codes d’un monde exclusivement masculin. En 1921, elle fonde et dirige son propre orchestre, l’« Orquesta Paquita », un sextet composé uniquement d’hommes, dont le pianiste n’est autre qu’un certain Osvaldo Pugliese, alors adolescent. Son succès est phénoménal. Lorsqu’elle se produit dans les cafés de la célèbre rue Corrientes, l’artère du spectacle de Buenos Aires, les foules sont si denses qu’elles débordent sur la chaussée, coupant la circulation pour apercevoir “La mujer bandoneón“, la Femme Bandonéon. Son existence même était un acte politique. En s’emparant de cet instrument et en dirigeant des hommes sur scène, elle ne se contentait pas de jouer de la musique ; elle redéfinissait les rôles et revendiquait une place de leader dans un espace qui lui était interdit.  

Son héritage ne se limite pas à sa performance. Paquita était également une compositrice de talent. La consécration ultime de sa légitimité artistique viendra lorsque le plus grand de tous, Carlos Gardel, enregistrera ses compositions, notamment les tangos “La enmascarada” (La femme masquée) et “Soñando” (En rêvant). Par ce geste, Gardel ne faisait pas que reconnaître son talent ; il validait sa place en tant que créatrice au panthéon du tango. Malheureusement, sa carrière météorique fut stoppée net. Paquita Bernardo est décédée d’une maladie respiratoire en 1925, à l’âge de 24 ans, laissant derrière elle le souvenir d’une pionnière absolue, une “fleur de Villa Crespo” qui a ouvert la voie à toutes les femmes qui oseraient, après elle, prendre leur place au cœur de la musique.  

Les voix qui ont fait le Tango – Portraits de divas et de rebelles

Si Paquita Bernardo a ouvert une brèche dans le monde instrumental, une autre révolution se préparait, celle de la voix. Initialement, le tango était une musique essentiellement instrumentale, destinée à la danse. Tout a changé en 1917 lorsque Carlos Gardel a enregistré “Mi Noche Triste” (Ma Triste Nuit). Pour la première fois, un tango racontait une histoire personnelle, une complainte d’amour et de perte. Cette chanson a marqué la naissance du “tango-canción” (le tango-chanson), un genre destiné à être écouté autant qu’à être dansé. Comme l’a dit le poète Enrique Santos Discépolo, le tango est passé “des pieds à la bouche”.  

Dans le sillage de Gardel, une génération de femmes chanteuses, surnommées “Las Fundadoras” (Les Fondatrices), a émergé dans les années 1920. Elles ne se sont pas contentées d’interpréter des chansons écrites par des hommes ; elles ont imposé leurs propres styles, leurs propres personnalités, et ont offert une diversité d’expressions féminines qui manquait cruellement au tango. Pour illustrer cette richesse, penchons-nous sur deux figures emblématiques, deux archétypes que tout oppose mais qui, ensemble, dessinent le spectre de la femme dans le tango.  

 

Tita Merello

 

Tita Merello, la voix de l’arrabal

Tita Merello (1904-2002) est la voix brute, l’âme des faubourgs (arrabal) de Buenos Aires. Son histoire est celle d’une survivante. Née dans la pauvreté, abandonnée par sa mère, elle a grandi dans les rues et les orphelinats, forgeant un caractère d’acier pour affronter la vie. Elle disait avoir appris l’art dramatique non pas dans les écoles, mais “dans la rue Corrientes, quand tu marches toute la nuit sans avoir où dormir”. Sa personnalité entière se retrouve dans son art. Surnommée “La Negra” ou “Muñeca Brava” (la Poupée Dure), elle n’avait pas une voix techniquement parfaite, mais elle possédait quelque chose de bien plus puissant : une expressivité viscérale, une capacité à vivre chaque mot. Un critique de l’époque disait qu’elle “interprète les tangos comme une actrice. Chaque tango est une petite pièce de théâtre”.  

Son héritage est encapsulé dans une chanson : “Se dice de mí” (On dit de moi). Écrite à l’origine pour un homme se moquant de sa propre laideur, Tita Merello s’en empare en 1954 et la transforme radicalement. Dans sa bouche, la chanson devient un hymne d’affirmation de soi, un manifeste féministe avant l’heure. Avec une ironie mordante, elle y énumère tous les défauts qu’on lui prête – “que je suis moche, que je suis maigre, que ma bouche est trop grande” – pour conclure avec un haussement d’épaules triomphant, se moquant du jugement des autres et célébrant son individualité. Elle ne chantait pas seulement un tango ; elle revendiquait le droit d’être soi-même, sans compromis.  

 

Libertad Lamarque

 

Libertad Lamarque, la reine exilée

À l’opposé du spectre se trouve Libertad Lamarque (1908-2000). Si Tita Merello était la voix de la rue, Lamarque était celle de la scène, la reine incontestée du mélodrame. Surnommée “La Reina del Tango”, elle a connu une carrière d’une longévité exceptionnelle, s’étalant sur plus de 70 ans, avec à son actif 65 films et plus de 800 chansons enregistrées. Son style était plus poli, sa voix puissante et dramatique, parfaite pour les grandes tragédies amoureuses qu’elle incarnait à l’écran et sur scène.  

Sa vie elle-même fut un mélodrame. Sa légende est indissociable de sa rivalité avec une autre figure mythique de l’Argentine : Eva Perón. La rumeur, jamais entièrement confirmée ni démentie, veut qu’une altercation violente ait éclaté entre les deux femmes sur un plateau de tournage en 1944, avant qu’Eva ne devienne la toute-puissante “Evita”. Lorsque Juan Perón accéda au pouvoir, Libertad Lamarque fut mise sur liste noire, bannie des ondes et des écrans argentins. Cet ostracisme la poussa à l’exil au Mexique, où elle reconstruisit une carrière encore plus éclatante, devenant une idole dans toute l’Amérique latine. Cet exil forcé, loin de la briser, a ajouté une aura de tragédie et de résilience à sa légende.  

La coexistence de ces deux figures, la rebelle des faubourgs et la reine du mélodrame, est fondamentale. Elle prouve que les femmes n’ont pas simplement trouvé une voix dans le tango, mais une multitude de voix. Elles ont brisé le moule de la femme passive et pleurnicharde des premiers tangos pour créer des personnages complexes, forts, diversifiés, allant de l’authenticité brute à la sophistication glamour. Elles ont montré qu’il n’y avait pas une seule façon d’être une femme dans le tango, mais une infinité.

 

María Luisa Carnelli, parolière de Tango et poésie

 

Les mots cachés – Les poétesses derrière les tangos éternels

Si les chanteuses ont conquis la scène, le monde de l’écriture du tango, celui des paroliers (letristas), est resté une forteresse masculine encore plus difficile à pénétrer. Dans cet univers de poètes et de truands, où le lunfardo (l’argot de Buenos Aires) était la langue reine, l’idée qu’une femme puisse écrire un tango était presque impensable. Pourtant, certaines l’ont fait, souvent en dissimulant leur identité pour pouvoir exister.

La figure la plus emblématique de cette lutte pour la reconnaissance intellectuelle est sans doute María Luisa Carnelli (1898-1987). Poétesse, journaliste, socialiste et femme divorcée élevant seule son fils, Carnelli était une femme en avance sur son temps. Dans les années 1920, elle se lance dans l’écriture de paroles de tango, un domaine où les femmes étaient totalement absentes. Consciente des préjugés et des barrières, mais ayant besoin de subvenir aux besoins de sa famille, elle adopte une stratégie radicale : elle se cache derrière des pseudonymes masculins.  

Elle signait ses œuvres “Luis Mario” – une inversion masculinisée de son propre nom – ou “Mario Castro”, le nom de son fils. Sous ces identités d’emprunt, elle a écrit certains des tangos les plus célèbres de l’âge d’or, comme “Se va la vida” (La vie s’en va) ou “Cuando llora la milonga” (Quand la milonga pleure), interprétés par les plus grandes stars, y compris Carlos Gardel et Azucena Maizani. Son subterfuge révèle une contradiction profonde du monde du tango de l’époque : on célébrait la voix de la femme sur scène, en tant qu’interprète et objet de spectacle, mais on résistait à son intellect, à sa capacité à être la source de la création, l’auteur du récit.  

Le travail de Carnelli n’était pas seulement une infiltration ; c’était une subversion. Ses paroles, écrites du point de vue d’une femme, offraient une sensibilité nouvelle. Elle a rompu avec les clichés du compadrito violent et de la femme victime d’un destin funeste. Dans ses textes, elle explore des thèmes comme la liberté, le passage du temps et l’amour sans fatalisme, introduisant une perspective féminine subtile mais révolutionnaire au cœur même de la poésie du tango. L’histoire de María Luisa Carnelli est celle d’une conquête silencieuse, la preuve qu’avant même de pouvoir signer de leur propre nom, les femmes ont infusé leur âme dans les mots du tango.  

D’un rôle à l’autre – La femme au cœur de l’abrazo

L’évolution du rôle des femmes ne s’est pas limitée à la musique et aux paroles ; elle a profondément transformé l’essence même de la danse. On résume souvent le tango à un cliché : “l’homme guide, la femme suit”. Si cette formule contient une part de vérité mécanique, elle masque une réalité bien plus complexe et subtile, une réalité qui a elle-même évolué au fil du temps.  

Aux origines, le rôle de la femme était effectivement celui d’une suiveuse quasi passive. Mais le tango moderne a réinventé cette dynamique. Aujourd’hui, on ne parle plus de “guider” et “suivre”, mais d’un dialogue corporel, d’une conversation intime et sans paroles. L’expression la plus juste est peut-être celle-ci : “l’homme propose, la femme dispose”. Dans cette danse, le leader initie un mouvement, une direction, une énergie. Mais la partenaire n’est pas une marionnette. Elle est dans une écoute active et constante. Elle interprète la proposition, y répond, l’enrichit de sa propre musicalité, de ses ornements, de sa présence. Sans son écoute et sa réponse créative, le guidage du leader reste une phrase inachevée. L’étreinte, l’ abrazo, devient alors un espace de co-création, où deux individus indépendants, chacun stable sur son propre axe, choisissent de créer un mouvement commun.

Cette évolution conceptuelle a trouvé une traduction très concrète sur les pistes de danse du monde entier. Il est devenu de plus en plus courant de voir des femmes prendre le rôle du leader, guidant d’autres femmes ou même des hommes. Ce changement de rôle n’est plus une simple curiosité, mais une pratique acceptée qui reflète les transformations de la société et l’aspiration à une plus grande égalité.  

Cette fluidité des rôles a atteint son apogée avec l’émergence du “Tango Queer”. Né dans les années 2000, ce mouvement dissocie complètement les rôles de leader et de suiveur du genre des danseurs. Un homme peut guider une femme, puis la suivre dans la danse suivante. Deux femmes ou deux hommes peuvent danser ensemble, échangeant les rôles au milieu d’un même tango. L’invitation à danser elle-même est libérée des codes traditionnels. Le Tango Queer ne se définit pas par l’orientation sexuelle des danseurs, mais par cette liberté fondamentale de choisir son rôle. Il représente l’aboutissement de ce long cheminement vers l’égalité : l’ abrazo devient un espace de pure connexion, un dialogue entre deux personnes, libéré de toute attente sociale ou de genre.

C’est précisément cette dimension de connexion, d’écoute et de confiance mutuelle qui est au cœur de l’approche thérapeutique du tango que nous cultivons ici, à Diamono. Dans nos ateliers “Tango pour Tous”, nous n’enseignons pas seulement des pas. Nous invitons à expérimenter ce dialogue corporel, à sentir comment l’écoute de l’autre permet de trouver un équilibre commun, comment la confiance dans l’étreinte peut apaiser et renforcer l’estime de soi. La transformation du rôle de la femme dans la danse est la manifestation physique des conquêtes menées par les pionnières que nous avons évoquées. Le courage de Paquita de diriger un orchestre, l’audace de Tita de chanter sa propre vérité, la persévérance de María Luisa d’écrire le monde de son point de vue, tout cela trouve un écho aujourd’hui dans la liberté de chaque danseuse de devenir, à son tour, la créatrice de sa propre danse.  

Nom

Période

Rôle principal

Contribution clé & anecdote

 

Paquita Bernardo

1920-1925

Bandonéoniste, compositrice, cheffe d’orchestre

A brisé le tabou en devenant la première femme bandonéoniste professionnelle. Elle dirigeait son propre orchestre, qui incluait un jeune Osvaldo Pugliese au piano.

 

Tita Merello

1920s-1980s

Chanteuse, actrice

Incarnation de la femme “rea” (des faubourgs), forte et indépendante. A transformé la chanson “Se dice de mí” en un hymne d’affirmation de soi.

 

Libertad Lamarque

1920s-2000

Chanteuse, actrice

Surnommée “La Reine du Tango”, elle est devenue une superstar internationale. Son exil du fait de son conflit avec Eva Perón a ajouté à sa légende.

 

María Luisa Carnelli

1920s-1940s

Parolière, poétesse, journaliste

A écrit des paroles de tangos fondamentaux sous des pseudonymes masculins (“Luis Mario”) pour être acceptée dans un milieu littéraire exclusivement masculin.

 

 

Conclusion : Un héritage vivant pour le Café-Tango

Le voyage que nous venons de faire nous a menés des ruelles obscures de Buenos Aires aux scènes illuminées du monde entier. Nous avons vu la femme dans le tango passer du statut de silhouette silencieuse à celui de révolutionnaire du bandonéon avec Paquita Bernardo ; de muse tragique à celui de voix puissante et plurielle avec Tita Merello et Libertad Lamarque ; de sujet de poèmes à celui de poétesse cachée avec María Luisa Carnelli ; et enfin, de simple suiveuse à celui de partenaire égale et créatrice dans l’étreinte de la danse.

Cet héritage de courage, de créativité et de quête de connexion n’est pas une simple relique du passé. Il est vivant, il respire et il vibre aujourd’hui dans chaque accord de bandonéon, dans chaque vers chanté, et dans chaque abrazo partagé sur une piste de danse. C’est cet esprit que nous célébrons ici, au Café-Tango de Diamono.

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